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Comment accompagner une victime de harcèlement moral ou sexuel ?

Les victimes du harcèlement sexuel sont nombreuses : au cours de sa carrière, pas moins d’une femme sur cinq y sera confrontée en France. Malgré cette réalité frappante, dans les faits, le dialogue est peu ouvert sur le sujet du harcèlement et des violences sexuelles en entreprise. En effet, seules 3 victimes sur 10 rapportent les faits à leur hiérarchie.

Alors, comment gérer ces situations sexistes, ô combien délicates, quand la victime a finalement eu le courage de se confier ? Comment remplir le devoir de prévention et de protection de l’employeur et accompagner au mieux les victimes et témoins dans une affaire de harcèlement sexuel ?

SOS harcèlement sexuel : savoir recueillir le témoignage et prendre en charge la victime

Prendre en considération le signalement de harcèlement sexuel

La prise de parole sur le sujet du harcèlement sexuel au travail est extrêmement complexe pour ses victimes. Ainsi, quand vous êtes face à l’une d’elles, il est important d’avoir un certain nombre de clés pour accueillir leur témoignage du mieux possible :

  • Une écoute active de la victime de harcèlement sexuel : vous devez accueillir les confidences avec bienveillance, et recueillir les premiers éléments qui permettront de caractériser la situation.
  • Un discours déculpabilisant et rassurant : ouvrir le dialogue n’a pas été facile, et même si vous avez un devoir de neutralité, faire savoir à la victime qu’elle n’est plus seule représentera un véritable soulagement pour elle.
  • Un rappel de la loi, des droits et recours possibles pour la victime : droit de retrait, prise de contact avec le Défenseur des droits, dépôt de plainte formelle, procédure de signalement du harcèlement en ligne etc.

A noter : arriver à créer un climat dans lequel les victimes oseront prendre la parole représente un travail de terrain quotidien, des prises de contacts, et des dialogues réguliers avec les équipes.

Orienter la victime de harcèlement sexuel pour la meilleure prise en charge

Ce premier entretien est également l’occasion d’organiser la prise en charge de la victime harcelée. Celle-ci peut se faire à plusieurs niveaux :

  • Médicale : vous pouvez mettre en relation la victime avec un médecin du travail (en urgence au besoin). Cette visite bénéficiera, comme tout acte de médecine, du secret médical. Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures visant à préserver la santé du salarié harcelé, qui devront être prises en compte par l’employeur.
  • Psychologique : une prise en charge psychologique permet d’apporter soutien et accompagnement à la victime de harcèlement. Elle peut alors se confier dans un environnement neutre, où la parole sera plus facile à prendre.
  • Sociale : le lien avec les services sociaux se fait généralement de pair avec le contact de la médecine du travail. Vous pouvez également communiquer les coordonnées d’associations spécialisées, qui pourront apporter une aide précieuse aux victimes.
  • Administrative : la prise en charge doit être formalisée. Un premier rapport doit être établi, qui sera le point de départ de l’enquête qui suivra.
  • Juridique : si la victime souhaite porter plainte, vous pouvez la mettre en relation avec des services d’assistance et de protection juridique afin notamment qu’elle prenne connaissance des différentes procédures pénales et prud’homales.

Important : le supérieur hiérarchique direct de la victime peut parfois être le point d’entrée de ce type de confidence. Si vous êtes concerné(e), vous avez le devoir de remonter l’information aux ressources humaines. Attention à conserver une attitude neutre et distanciée par rapport à la situation : vous n’avez pas à vous prononcer sur les faits, ou à prendre des sanctions, tant qu’une enquête harcèlement sexuel n’aura pas été menée.

SOS harcèlement : remplir le devoir de protection envers les salariés et sanctionner l’auteur des faits

Une fois que vous avez dirigé la victime vers les interlocuteurs appropriés pour la prendre en charge, une procédure stricte est à suivre. A défaut, l’employeur pourrait voir sa responsabilité engagée sur le fondement de son obligation de sécurité à l’égard de ses salariés.

Prendre des mesures de protection d’urgence de la victime de harcèlement sexuel ou d’agissements sexistes au travail

Tout dépend de la situation bien sûr, mais si nécessaire, le premier réflexe est de prendre des mesures de protection d’urgence de la victime :

  • Cela peut passer par l’éloignement temporaire du harceleur ou de la victime.

A noter : il est également important de veiller à la protection contre le licenciement et les mesures discriminatoires directes et indirectes des victimes, mais aussi des témoins, suite à leur prise de parole. Cette mesure de protection est valable que les faits s’avèrent vrais ou non, tant qu’il y a absence de mauvaise foi de la part des victimes présumées et des témoins (Article L. 1153-2 et L. 1153-3 du Code du travail).

Procéder à une enquête interne

  • Ce n’est qu’une fois la sécurité de tous garantie que l’on peut passer à la phase d’investigation :
  • Dans la mesure du possible, les différents protagonistes doivent tous être entendus : victime(s), témoin(s), et auteur(s) des faits.
  • Un rapport détaillé doit être écrit, qui doit être le plus documenté possible : nature des faits, dates, lieux, heures, dommages subis, suites données, etc.
  • Ce rapport doit aboutir à une conclusion claire, à partir de laquelle la suite des événements découlera.

Pour garantir la bonne conduite de l’enquête, il est conseillé d’éviter au maximum le contact entre les différentes parties prenantes et ce, tant que le rapport final de l’enquête n’a pas été livré.

Bon à savoir : il est important d’informer les membres du CSE (Comité Social et Économique) de la situation. Notez que si l’alerte initiale a été donnée par un des membres du CSE, il/elle devra être partie prenante de l’enquête lancée.

Sanctionner l’auteur des faits

Si les faits sont avérés, leur auteur doit être sanctionné :

  • Attention, tant que l’enquête n’a pas abouti, la présomption d’innocence s’applique. Aucune sanction disciplinaire ne peut donc être donnée avant.
  • Les sanctions disciplinaires prises par l’entreprise sont indépendantes d’une éventuelle procédure juridique envers l’auteur des faits.
    • Même en cas de classement sans suite ou si la victime n’a pas porté plainte, cela n’empêche en rien la prise de sanctions disciplinaires par l’employeur.
    • En revanche, dès lors qu’une sanction pénale est prononcée par la justice, l’employeur est tenu de prendre des sanctions disciplinaires.

Le degré de la sanction varie en fonction de la faute commise : mise à pied, rétrogradation, mutation, rupture du contrat de travail, etc.

SOS harcèlement sexuel : réussir à gérer l’après 

L’accompagnement d’un ou plusieurs cas avérés de harcèlement sexuel ne s’arrête pas là. L’entreprise doit également veiller à :

  • Favoriser la réintégration de la victime de harcèlement : dans certains cas, il peut être trop compliqué pour la victime de reprendre son ancien poste. Avec son accord, et celui de la médecine du travail, une nouvelle affectation peut être envisagée.
  • Réaliser un suivi
    • Il est capital de communiquer des suites données à l’enquête à la victime et plus globalement aux différentes personnes impliquées.
    • Par ailleurs, l’incident est nécessairement révélateur d’un dysfonctionnement dans l’entreprise. Une analyse doit donc être faite pour savoir comment cela a pu se produire et quelles mesures préventives peuvent être prises pour que cela ne se reproduise plus.
    • Enfin, il est très important d’ouvrir le dialogue sur le sujet, via par exemple l’organisation d’ateliers ou de groupes de parole.

L’idéal est de prendre le sujet en main avant de se retrouver en situation de crise. Découvrez nos offres de formation pour prévenir le harcèlement sexuel en entreprise.

Le harcèlement moral

Qu'est-ce que le harcèlement moral ? Définition

Le harcèlement moral se traduit par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible  :

  • de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié ;
  • d'altérer sa santé physique ou mentale ;
  • ou de compromettre son avenir professionnel.

L'auteur du harcèlement moral peut faire l'objet de plusieurs sanctions :

une sanction pénale prononcée par un juge ;

une sanction disciplinaire prononcée par l'employeur.

Il peut également être condamné à verser des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par la victime de harcèlement moral.

Quelles sont les formes de harcèlement moral au travail ?

Le harcèlement moral peut se traduire sous différentes formes, en fonction du statut hiérarchique que l'auteur des faits occupe dans l'entreprise.

En effet, il peut s'agir :

  • de harcèlement vertical descendant : d'un manager vers un subordonné. Il s'agit d'un abus de pouvoir hiérarchique ;
  • de harcèlement horizontal : d'un salarié à l'égard d'un autre salarié.
  • de harcèlement vertical ascendant : d'un collaborateur vers un supérieur hiérarchique ;
  • de harcèlement latéral : le harcèlement est exercé par une personne tierce (un client, un fournisseur...) sur un collaborateur de l'entreprise.

Par ailleurs, le harcèlement moral n'est pas nécessairement exercé par une seule personne. Il peut en effet provenir de plusieurs personnes (d'une équipe contre un seul salarié de cette équipe ou d'une équipe sur leur manager).

Qu'est-ce qui peut être considéré comme du harcèlement moral ?

Les exemples de harcèlement moral sont très nombreux. Voici une liste de faits susceptibles de constituer un harcèlement psychologique :

  • dénigrement et brimade ;
  • critique injustifiée ;
  • humiliation publique ;
  • mise au placard ;
  • avertissements infondés ;
  • pression disciplinaire ;
  • mise à l'écart ;
  • propos agressifs ;
  • changements de poste à répétition.

Comment savoir si on est victime de harcèlement psychologique au travail ?

Pour être certain que les faits qui vont sont infligés rentrent bien dans le cadre du harcèlement moral, vous devez vous poser les questions suivantes :

les faits que vous subissez sont-il répétés ou s'agit-il d'un fait isolé ?

les faits ont-il pour conséquence une dégradation de vos conditions de travail ?

si oui :- ces faits portent-ils atteinte à vos droits et à votre dignité ?- ces faits ont-ils un impact négatif sur votre santé physique ou mentale (trouble du sommeil, angoisse, dépression, dépendance à l'alcool ou à la drogue, burn-out...) ?- ces faits risquent-ils à terme de compromettre votre avenir professionnel (rétrogradation, licenciement abusif...) ?

Si vous cochez toutes les cases, il se peut en effet que vous soyez victime de harcèlement moral en entreprise. 

Comment prouver que vous êtes victime de harcèlement moral ?

Lorsqu'un litige relatif à des agissements de harcèlement moral survient, le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Pour cela, le salarié doit donc rassembler des preuves telles que des témoignages, des SMS et/ou mails, des courriers ou encore des certificats médicaux. Se faire accompagner par un avocat est pertinent pour constituer votre dossier.

Il appartiendra à la partie défenderesse, c'est-à-dire, à l'auteur du harcèlement moral, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Que faire en cas de harcèlement moral au travail ?

Une fois qu'il a rassemblé les éléments de preuves laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral au travail, le salarié dispose de plusieurs moyens d'action pour faire cesser le harcèlement dont il est victime.

1. Alerter l'employeur

La première chose à faire, en cas de harcèlement, est d'alerter votre employeur sur le fait que vous subissez des actes de harcèlement moral, à condition, bien évidemment qu'il ne s'agisse pas de harcèlement vertical descendant. 

Pour garder une trace écrite et vous constituer un élément de preuve supplémentaire, informez votre employeur par lettre recommandée avec accusé de réception.

2. Alerter le CSE

Vous pouvez également prévenir le Comité social et économique (CSE).

Si un membre du CSE constate, notamment par l'intermédiaire d'un travailleur, qu'il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise, il en saisit immédiatement l'employeur.

L'employeur devra alors procéder, sans délai, à une enquête avec le membre du CSE et prendre les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation.

Si l'employeur ne fait rien ou s'il n'est pas d'accord concernant la réalité de l'atteinte et si aucune solution n'est trouvée, le salarié saisit le bureau de jugement du Conseil de prud'hommes. Les juges statuent alors selon la procédure accélérée au fond.

Le CSE peut également saisir le Conseil de Prud'hommes s'il avertit le salarié par écrit et que ce dernier ne s'y oppose pas.

S'il constate qu'il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l'entreprise, le CSE dispose d'un droit d'alerte et doit en saisir immédiatement l'employeur.

3. Tenter une médiation

Vous pouvez aussi engager une procédure de médiation avec l'auteur des faits.

Le médiateur tentera alors de concilier les parties afin que la victime et l'auteur des faits parviennent à un accord visant à faire cesser toute situation de harcèlement moral. 

4. Alerter l'inspection du travail

L'inspection du travail, si elle constate un cas de harcèlement, peut transmettre le dossier à la justice.

En effet, l'inspecteur du travail peut intervenir dans les cas de harcèlement au sein de l'entreprise.

5. Alerter la médecine du travail

Vous pouvez alerter la médecine du travail pour qu'elle prenne des mesures pour protéger votre santé.

Vous avez en effet la possibilité de prendre contact avec la médecine du travail à n'importe quel moment et n'êtes pas obligé d'attendre votre prochaine visite. 

6. Saisir le Conseil des prud'hommes

Pour obtenir réparation du préjudice subi, vous pouvez saisir le Conseil de prud'hommes.

La procédure pénale sera dirigée à l'encontre de votre employeur et ce, même s'il n'est pas l'auteur direct du harcèlement. En effet, il pourra être poursuivi pour ne pas avoir pris les mesures nécessaires pour vous protéger contre des faits de harcèlement moral.

Bon à savoir :

Vous disposez d'un délai de 5 ans après le dernier fait de harcèlement pour saisir le Conseil de prud'hommes.

7. Saisir le juge pénal

Vous avez également la possibilité de saisir le juge pénal pour poursuivre l'auteur direct des faits de harcèlement moral.

Bon à savoir :

Vous disposez d'un délai de 6 ans à compter du fait de harcèlement le plus récent dont vous avez été victime pour déposer une plainte au devant le tribunal correctionnel.

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Date d'insertion: 09/10/2022

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